Trois membres du parti socialiste, adhérents de la section de New York, analysent dans le document ci-dessous (qui n'engage que leurs auteurs) les raisons de la victoire de Nicolas Sarkozy, et en particulier comment la stratégie mise en oeuvre par l'équipe Sarkozy a été proche en terme d'outils et de préparation de celle de Georges W. Bush aux Etats-Unis.
L'analyse est très intéressante, et démontre bien qu'il ne suffit pas de nos jours d'avoir de bonnes idées, il faut savoir, comme dans toute armée, mettre en place la logistique nécessaire, bien en amont (plusieurs années), et établir une stratégie de communication "populaire" digne de nos temps modernes.
Est en particulier parfaitement détaillée la stratégie de marketing politique, qui ne fait pas dans la dentelle, toute faille est utilisée pour décrédibiliser l'adversaire d'une façon ou d'une autre (on l'a bien vu en janvier surtout). D'autre part on promet tout ce que veulent entendre chaque "client", quitte à être en contradiction globale, ce n'est pas le problème (ça me rappelle quelque chose...). Puis on distille ses idées (positives ou négatives) au sein des médias afin qu'elles soient reprises par eux et au final réappropriée par les citoyens auditeurs ou lecteurs, sans voir le lien initial.Donc pour lutter contre une telle artillerie lourde, il faut construire la même en face, tout en préservant son éthique (c'est mon commentaire personnel). Car un des plus gros défis dans ce genre de bataille est de savoir contrer la calomnie et la diffamation. Or comment faire cela efficacement sans tomber dans le même travers ? C'est un vrai problème de fonds.
On peut néanmoins conclure après une telle analyse que le score obtenu par Ségolène Royal est réellement excellent, car la défaite aurait pu être bien plus lourde face à une telle machine et avec seulement quelques mois de préparation et autant d'ennemis internes. C'est d'ailleurs un des premiers éléments de surprise de la droite, qui s'attendait à un effondrement de leur adversaire face à leur machine de guerre, effondrement qui n'a pas eu lieu. Les idées défendues par Ségolène Royal sont donc en phase avec au moins une bonne moitié du pays, il faut maintenant que le parti socialiste (ou son successeur) fasse le travail nécessaire de professionnalisation du combat politique et de rupture idéologique par rapport au passé afin d'être au niveau nécessaire et pouvoir peser concrètement face à ses adversaires..
Nicolas Sarkozy : une victoire à la Bush
Par Corinne Narassiguin, Christophe Monier, Franck Millan (Section de New York)
Lettre ouverte à nos camarades socialistes – En résumé
Si nous devons tirer sans complaisance les raisons de notre dernière défaite, nous devons également analyser ce qui a permis à Nicolas Sarkozy de gagner. Vu des Etats-Unis, nous pouvons dire qu'il a réussi sa campagne grâce à une performante machine de communication, comparable à celle que Karl Rove a monté pour Georges W. Bush.
Le marketing politique mis au service de la campagne:
- Les
propositions politiques réduites à des slogans fabriqués pour être
facilement enregistrés par les électeurs et porteurs d'une
signification forte. Comme pour la publicité commerciale, le lien
objectif entre le slogan et la proposition politique n'est pas établi
(Chez Bush : "No Child Left Behind", suppression de la Death Tax. Chez
Sarkozy : "Travailler plus pour gagner plus", suppression de l'impôt
sur les successions, "L'immigration choisie").
- Une communication
calibrée sur la base des matrices façon Karl Rove : connaître les
attentes de son électorat pour diffuser un discours à même de le
séduire. L'objectif est de s'assurer le soutien de sa base électorale
(Chez Bush : contre le mariage gay et contre l'avortement, opposition à
la théorie de l'évolution de Darwin. Chez Sarkozy : le ministère de
l'immigration et de l'identité nationale, la racaille nettoyée au
Karcher).
- Organisation et discipline de la communication: tous
les membres du parti relaient la ligne politique du leader, on s'assure
également des relais dans les médias (Bush et Sarkozy ont limité toute
opposition au sein de leurs partis et ont des relations étroites avec
les groupes de médias)
- Exploitation des faiblesses supposées de
l'adversaire afin de le décrédibiliser (Bush accuse les Démocrates de
ne pas pouvoir assurer la défense des Américains ainsi que d'être
faibles dans la lutte contre le terrorisme. Sarkozy clame que les
socialistes sont nuls en gestion et en économie, qu'ils sont laxistes
dans la lutte contre la délinquance, qu'ils sont partisans de
l'assistanat).
- Faire passer les échecs pour des succès (Pour
Bush : le désastre en Irak n'est pas reconnu. Pour Sarkozy : la
non-publication de certains rapports pour afficher une action positive
au ministère de l'intérieur).
Les propagandes de Bush et de Sarkozy sont d'autant plus redoutables qu'elles sont testées, diffusées dans l'électorat pendant des années avant la campagne. Ils ont compris que les batailles de communication se gagnent sur le long terme. Les Démocrates aux Etats-Unis ou nous-mêmes en France ne pouvons pas imposer nos programmes quand ils sont présentés quelques semaines seulement avant les élections. Le retard dans la communication ne peut pas être rattrapé.
Apres l'élection:
- L'ouverture dans la
constitution du gouvernement : un affichage de la volonté d'intégrer
une large composante du spectre politique quand la politique menée est
centrée sur sa ligne idéologique (Bush enrôle Norman Mineta. Sarkozy
embauche Bernard Kouchner).
- Les liens consanguins avec les
medias (Chez Bush : échanges croisés avec les médias, des proches
deviennent analystes/journalistes dans les médias ; un présentateur
vedette de Fox News devient porte-parole de la Maison Blanche. Chez
Sarkozy : des proches nommés a TF1 et France24 ; des journalistes sont
embauchés a l'Elysée)
Par cette lettre ouverte à tous nos camarades socialistes, nous voulons dire au PS qu'il est temps de professionnaliser notre communication. Nous ne pouvons pas laisser la machine de propagande Sarkozy tourner à plein régime pendant cinq ans. Il ne faudra rien laisser passer : pas une conférence de presse présidentielle sans réponse du PS, pas d'action du gouvernement sans proposition du PS pour améliorer ou contrer. Pas une critique lancée par l'UMP contre le PS ou un de ses dirigeants laissée sans réplique. Notre communication doit devenir audible, soigneusement préparée, cohérente. Sinon, la nécessaire et indispensable rénovation ne suffira pas, et nous partirons de nouveau en campagne en 2012 avec un gros handicap.
***************************
Lettre ouverte à nos camarades socialistes – Texte intégral
Nicolas Sarkozy n'a pas gagné par hasard, ni même par défaut. S'il faut tirer sans complaisance les leçons de notre défaite, nous devons également nous pencher sur les raisons de sa victoire. Car, ne nous en déplaise, Nicolas Sarkozy a bien réussi sa campagne, il a atteint ses objectifs. Il s'y préparait depuis cinq ans, et avait choisi son modèle : la machine de propagande montée par Karl Rove pour George W. Bush.
En
effet, ce qui est frappant en rétrospective, c'est l'efficacité de la
communication de Nicolas Sarkozy. Vu des Etats-Unis, la ressemblance
avec la méthode Bush est indéniable.
Les Démocrates américains ont
perdu les élections (présidentielles ou parlementaires) en 2000, 2002
et 2004. En 2006, ce sont les Républicains qui ont perdu, et non pas
les Démocrates qui ont gagné, car la réalité de l'incompétence de
l'administration Bush (la gestion des conséquences de l'ouragan
Katrina, la persistance des échecs en Irak) était devenue trop
difficile à maquiller.
Ces dernières années, c'est donc bien
l'efficacité de la machine de communication de Bush qui a largement
déterminé le résultat des élections nationales.
En 2000, face
à un Al Gore peu sûr de sa stratégie (comment se réclamer des réussites
économiques de l'Administration Clinton sans s'associer au scandale «
Monica »?), l'équipe Bush peut le ringardiser avec une remarquable
efficacité. Au final, Al Gore se retrouve dépossédé de la présidence à
cause de la débâcle de l'élection en Floride, alors qu'il avait les
moyens de gagner sans équivoque.
A cette époque, les slogans se
mettent en place, promettant ce que beaucoup ont envie d'entendre, mais
cachant en fait des politiques contraires : le conservatisme
compassionnel, la loi « No Child Left Behind » (aucun enfant laissé sur
le bord de la route), les programmes « Clear Skies Initiative »
(Initiative Cieux Propres) ou « Healthy Forests Initiative »
(Initiative Forêts Saines) négociés avec les lobbies des industries qui
combattent le protocole de Kyoto.
Les Républicains soignent
également leur base évangéliste et isolationniste, en polémiquant sur
des sujets complètement démagogiques : les immigrés illégaux venus
d'Amérique Latine, le mariage homosexuel, les cellules souches, la
théorie de l'évolution darwiniste contre le design intelligent,
l'avortement tardif (généralement autorisé pour raisons médicales). En
pratique, pour assurer une forte participation électorale de leur base
conservatrice, les Républicains organisent des référendums sur
l'interdiction du mariage homosexuel et sur l'avortement dans de
nombreux Etats le jour des élections fédérales (présidentielles et
parlementaires).
On peut d'ailleurs noter la créativité sans
vergogne des Républicains pour trouver des slogans qui frappent
l'imagination : l'avortement tardif est rebaptisé avortement par
naissance partielle (Partial Birth Abortion), l'impôt sur les
successions est surnommé l'impôt sur la mort (Death Tax)… Ces slogans
sont repris par les médias, ce qui permet de les imposer comme des
termes usuels et véhiculer ainsi une forte connotation négative et
émotionnelle sur des enjeux électoraux.
La machine Bush, avec à sa
tête Karl Rove, pilonne également ses opposants Démocrates sur leurs
faiblesses supposées dans le contexte post 11 septembre : la Défense
nationale, la lutte contre le terrorisme, le manque de courage pour un
leadership fort (comprendre la préférence pour le multi-nationalisme et
le compromis diplomatique plutôt que l'utilisation de la force brute de
la puissance américaine). Cette propagande est d'autant plus efficace
qu'elle est couplée à une politique de la peur. En périodes
électorales, Bush et son staff prédisaient des attaques sous forme de «
champignons nucléaires » dans les villes américaines en cas de victoire
des Démocrates, carrément comparée à une victoire des terroristes sur
le patriotisme américain. Pour entretenir ce climat anxiogène,
l'administration Bush joue avec les niveaux d'alerte jaune/orange/rouge
qui montent systématiquement avant toute échéance électorale ou date
importante.
L'équipe Bush devient également maîtresse dans l'art
de baisser la barre des attentes de la population. De 2000 à 2004, elle
arrive à maquiller ses échecs, et même à les faire passer pour des
réussites : on explique aux Américains que leur président fait un
travail extraordinaire dans une situation impossible. La guerre en Irak
et la lutte contre le terrorisme en sont les exemples les plus
évidents.
Par ailleurs, Bush prend soin d'entretenir son image de
président qui aime les choses simples, le barbecue et la pêche. Un type
sympa, dévoué à sa famille, son pays et sa foi. Avec un brio
extraordinaire, il parvient même à être vu par ses concitoyens comme un
cow-boy texan alors qu'il est bien le fils de son père, le premier
président Bush, c'est-à-dire un pur produit de la nouvelle Angleterre.
Ce
succès de communication est assuré par une série de messages qui sont
fabriqués par des spécialistes du marketing politique pour être ensuite
relayés de manière concertée et avec discipline. Comme une entreprise
vend ses produits, l'administration Bush vend sa politique en faisant
passer aux médias une information simple et positive : « le message du
jour ». Impossible pour les Américains de ne pas entendre ce que la
Maison Blanche veut leur faire savoir. Ils entendent et lisent les
mêmes mots, les mêmes slogans, que ce soit à la télévision, dans les
journaux, sur Internet. Tout est répété par les politiques
Républicains, mais aussi par des analystes et des journalistes.
Résultat, lorsque l'opinion s'interroge sur un thème politique, elle le
fait avec les mots soigneusement choisis par la Maison Blanche.
Surtout
en période électorale, les messages de l'équipe Bush sont aussi
préparés en fonction d'un principe tactique cher à Karl Rove : la
population américaine est divisée selon une matrice qui en couvre les
différents segments, et des messages ciblés sont systématiquement
utilisés en fonction de l'audience. Les attentes du vote Républicain
ont été soigneusement identifiées à l'aide d'études statistiques.
L'objectif est de savoir quel message véhiculer pour augmenter le
nombre de votants Républicains dans chaque tranche de l'électorat
américain et aussi quel média utiliser pour maximiser sa diffusion. Un
exemple, en suivant cette méthode, les stratèges Républicains savent à
quels sujets électoraux les agriculteurs Républicains du Middle-west
sont sensibles. Ainsi ils peuvent élaborer un discours propre à
augmenter leur nombre et utilisent des medias qui ont leur écoute.
De fait, en 2004, quand Kerry émerge des primaires présidentielles démocrates, il est déjà trop tard pour contrer la machine de propagande de Bush. Les Américains ont été persuadés que les Démocrates ne peuvent pas mieux faire en Irak ou dans la lutte contre le terrorisme que l'administration sortante, et ce handicap ne sera pas surmonté. En maître de la propagande, Karl Rove arrive même à dépeindre Kerry, pourtant un héros reconnu de la guerre du Viêtnam, comme un lâche qui ne respecte pas les troupes de l'armée américaine. L'attaque est tellement énorme et odieuse que Kerry préfère répondre par un silence dédaigneux. Grave erreur. La calomnie lui collera à la peau jusqu'au bout. La préférence de Kerry pour des positions prenant en compte la complexité du monde est également exploitée comme un manque de clarté, voire un manque de colonne vertébrale.
Revenons en France. Si
le contexte politique et les sujets prioritaires ou polémiques sont
souvent très différents de ce que l'on peut voir aux Etats-Unis,
Nicolas Sarkozy a semble-t-il bien compris comment les méthodes de
communication de l'administration Bush peuvent lui servir.
Depuis
cinq ans, il s'est appliqué à se différencier des gouvernements dont il
était pourtant le numéro 2. Au démarrage de la campagne présidentielle,
les Français avaient déjà bien assimilé que le Sarkozysme, ça n'a rien
à voir avec le Chiraquisme. Nicolas Sarkozy pouvait donc sans problème
incarner le changement, et même une forme d'alternance.
Il martèle
ses thèmes, construit son image de politicien actif et pragmatique, à
la recherche de résultats et au parler franc, un type proche des gens.
Il
met ses troupes en ordre de marche, et pendant trois ans prépare sa
campagne depuis la présidence de l'UMP. Il teste ses thèmes, définit sa
stratégie pour récupérer les voix du FN tout en maintenant la
discipline de la droite républicaine. Lui aussi découpe la population
française en catégories bien identifiées, et calibre ses messages en
conséquence.
Il impose ses slogans : travailler plus pour gagner
plus, la France qui se lève tôt, non à l'assistanat, la lutte contre
les délinquants multirécidivistes, le bouclier fiscal, la suppression
des droits de succession, l'immigration choisie et l'identité
nationale…
Au final, pendant la présidentielle, Sarkozy n'a même
pas besoin de dérouler les détails de son programme. Il se paie même le
luxe de faire campagne sans jamais publier nulle part la totalité de
son projet. Il fait du clientélisme et promet tout et son contraire
sans paraître incohérent. Au-delà de la bienveillance des médias à son
égard, Sarkozy peut réussir ce pari parce qu'il a préparé l'électorat
français à son discours depuis plusieurs années. Quelques slogans
suffisent pour que les Français pensent savoir à qui ils ont affaire
et aussi ce que sera sa politique s'il est élu. Nul besoin de lui
demander d'expliquer son programme dans le détail. La cohérence de son
projet, c'est lui, et tout le monde croit le connaître.
En
face, le PS reste empêtré dans une rénovation toujours annoncée mais
jamais accomplie, dans les raccommodages d'après referendum. Le PS
donne l'image d'un parti à la recherche de son sauveur et de sa ligne
politique.
Sarkozy n'en perd pas une miette et participe largement
à populariser l'idée que le PS reste un parti archaïque et tumultueux,
sans projet. Comme Bush, il a compris qu'il faut mettre en avant tous
les déboires de ses adversaires, mais également leurs supposées
faiblesses : les socialistes sont dangereusement dépensiers et creusent
le déficit, ils ne comprennent rien à l'économie. Ils sont partisans de
l'assistanat (comprendre de l'aide aux paresseux) et adversaires du
mérite. Ils sont accrochés à leurs vieilles méthodes et préfèrent le
statu quo au changement. Ils sont laxistes sur la délinquance comme sur
l'immigration, etc.
Parallèlement, Sarkozy entretient les peurs,
surtout celle de la délinquance, bien ancrée dans l'opinion, en
traitant les jeunes des banlieues de racaille. Il se pose en premier
flic de France qui met de l'ordre au Karcher. Il parviendra pourtant à
ne pas être tenu comptable des émeutes de novembre 2005, et pour
soigner son passage au Ministère de l'intérieur, il empêche la
diffusion de rapports officiels sur l'état de l'insécurité dans
certains quartiers. Pendant la campagne, il ose même se déclarer
président des honnêtes gens, et accuse la gauche d'être du côté des
fraudeurs.
Lorsque Ségolène Royal émerge des primaires, la
rénovation - tardive du fait de notre calendrier - qu'elle lance en
même temps que la campagne n'a pas la clarté des slogans Sarkozystes
auxquels les Français sont déjà largement familiers. A quelques mois et
semaines des élections, nous en sommes encore à lancer de nouvelles
propositions alors que Sarkozy martèle les siennes depuis des mois.
La
machine de propagande de l'UMP profite du fait que Ségolène Royal est
une présidentiable de fraîche date ainsi que de nos querelles internes.
Avec l'aide plus ou moins ouverte des médias, elle alimente un procès
en incompétence contre notre candidate. Ce mauvais procès avait
commencé pendant les primaires socialistes et aura duré jusqu'à la fin
de la campagne. Avec intelligence et malice, Sarkozy charge les femmes
de l'UMP de porter les attaques les plus misogynes.
La machine UMP
est également bien contrôlée, personne ne parle de travers, tout le
monde suit la ligne fixée par le chef, tout le monde récite les mêmes
slogans.
Comme Bush, Nicolas Sarkozy manipule les attentes des gens
en baissant la barre pour le débat présidentiel. Il réussit à en
émerger comme le vainqueur simplement parce qu'il accomplit l'exploit
de ne pas s'énerver !
Bref, question communication, Sarkozy ne
néglige rien. Et cela lui donnera un énorme avantage tout au long de
cette campagne. Les Démocrates américains ne s'y sont pas trompés, eux
qui sont venus voir comment fonctionnait la campagne Sarkozy. Ils n'ont
pas songé à nous rendre visite.
Une fois élu, on voit que la méthode continue de bien fonctionner : tout est dans l'affichage.
Malgré
le dérapage incontrôlé de sa communication au sujet du yacht Bolloré
(un moment d'inattention dû a l'euphorie de la victoire sans doute), il
fait la démonstration une fois encore de ses talents.
La journée de son investiture est un morceau d'anthologie, avec une mise en scène impeccable.
L'ouverture
à gauche est également un coup de maître pour tuer le MoDem dans l'œuf
et déboussoler le PS pour les législatives. Pourtant il s'agit
indubitablement d'affichage, et pas d'ouverture politique véritable
correspondant à une vision cohérente. Comment sinon expliquer qu'il ait
pu proposer le Quai d'Orsay à Védrine pour ensuite le proposer à
Kouchner ? On ne pouvait pas trouver deux socialistes plus différents
en matière de politique étrangère.
Cette méthode rappelle celle de
G. Bush qui en 2001 nomme Norman Mineta, un démocrate ministre du
commerce du gouvernement sortant de Bill Clinton, comme ministre des
transports. Cet homme, premier américain d'origine asiatique a être
nommé ministre dans un gouvernement fédéral, un homme qui a connu
enfant les camps d'internement pour les Américains d'origine japonaise
durant la deuxième guerre mondiale, devait symboliser l'ouverture et la
diversité du gouvernement Bush. Il restera ministre jusqu'en 2006, sans
jamais se désolidariser des politiques liberticides et conservatrices
du gouvernement.
Le rapport entre les équipes politiques et les médias conservateurs est également comparable chez Bush et Sarkozy. Quand un commentateur vedette de la chaîne de télévision conservatrice Fox News devient le porte-parole de la Maison Blanche, et des politiciens conservateurs se reconvertissent dans le journalisme, il ne s'agit que de quelques exemples parmi tant d'autres. Un chassé-croisé semblable est désormais constaté entre les équipes de campagne de Nicolas Sarkozy et des télévisions et journaux français.
A cela on peut ajouter les messages plus subliminaux mais bien repris par la presse, qui servent à construire la légende Sarkozy : la comparaison avec la famille Kennedy, le président actif qui fait du jogging avec son Premier ministre…
Par cette lettre ouverte à tous nos camarades socialistes, nous voulons dire au PS qu'il est temps de professionnaliser notre communication. Nous ne pouvons pas laisser la machine de propagande Sarkozy tourner à plein régime pendant cinq ans. Il ne faudra rien laisser passer : pas une conférence de presse présidentielle sans réponse du PS, pas d'action du gouvernement sans proposition du PS pour améliorer ou contrer. Pas une critique lancée par l'UMP contre le PS ou un de ses dirigeants laissée sans réplique. Notre communication doit devenir audible, soigneusement préparée, cohérente. Sinon, la nécessaire et indispensable rénovation ne suffira pas, et nous partirons de nouveau en campagne en 2012 avec un gros handicap.
Technorati Tags: Sarkozy, Ségolène, Royal, France, Présidentielle, Bush, USA, Républicains, Rove
Commentaires