(image Techcrunch) Didier Olivennes, directeur de la FNAC, est à l'origine d'un accord entre professionnels de la musique, de cinéma et fournisseurs d'accès. Voici quelque articles à lire pour être informé:
1/ L'article dans lemonde.fr : "Mission Olivennes : signature de l'accord sur fond de grincements de dents"
2/ Un billet de Francis Pisani : "Pauvres français..."
3/ Un billet de Techcrunch.com : "If You P2P Download In France: No Internet For You"
4/ Un billet de Louis Nauges : "Quel prix pour la musique, la vidéo, l'information numérique ?"
5/ Le discours intégral de Nicolas Sarkozy
C'est grave d'en être arrivés là en France. D'abord parce que seuls les représentants du camps "anti-pirate" ont travaillé, sous la direction d'un "anti-pirate" intéressés à sauvegarder son monde actuel (PDG de la FNAC), d'autre part parce que Sarkozy compare le monde de l'internet au Far West:
"Aujourd’hui, un accord est signé, et je veux saluer ce moment décisif
pour l’avènement d’un internet civilisé. Internet, c’est une "nouvelle
frontière", un territoire à conquérir. Mais Internet ne doit pas être
un "Far Ouest" high-tech, une zone de non droit où des "hors-la-loi"
peuvent piller sans réserve les créations, voire pire, en faire
commerce sur le dos des artistes. D’un côté, des réseaux flambant neuf,
des équipements ultra-perfectionnés, et de l’autre des comportements
moyenâgeux, où, sous prétexte que c’est du numérique, chacun pourrait
librement pratiquer le vol à l’étalage.
On dit parfois que quand personne ne respecte la loi, c’est qu’il faut
changer la loi. Sauf que si tout le monde tue son prochain, on ne va
pas pour autant légaliser l’assassinat.
Si tout le monde vole la musique et le cinéma, on ne va pas légaliser
le vol. Et en même temps, nous savons tous qu’on ne va pas non plus
mettre tous les jeunes en prison.
Il nous fallait chercher des moyens intelligents et astucieux pour en
appeler à la conscience du citoyen, lui donner la possibilité de
rentrer dans le droit chemin. Il fallait aussi essayer de comprendre
pourquoi le citoyen ordinaire, habituellement respectueux de la loi,
préférait s’approvisionner dans des entrepôts clandestins plutôt que de
faire ses achats dans un supermarché en ligne : n’était-ce pas aussi un
problème d’attractivité de l’offre légale ?"
Les sanctions pour les soi-disant "pirates" (je ne parle pas des vrais pirates professionnels, largement minoritaires et pour qui la loi est déjà en place, qui revendent sous le manteau des cd, dvd et autres supports réellement piratés) ?
Leur accès internet coupé par leur FAI ! Et sur quelle base ? Parce qu'à partir de telle adresse IP on fait du téléchargement sur des sites "clandestins" ?
C'est du grand n'importe quoi. D'une part car c'est ne rien comprendre à l'évolution du monde actuel, et faire croire qu'on apporte des solutions "éthiques" alors qu'on est freine des quatre fers pour que le monde ne bouge pas est honteux. D'autre part parce que c'est techniquement et socialement fondamentalement injuste et anti-progrès. Un exemple tout bête, les Foneros qui partagent leurs connexions Wifi, que vont-ils faire ? Si des gens se connectent à leur routeur et téléchargent des trucs "illégaux", la connexion internet du Foneros sera coupée car il sera impossible d'identifier le vrai auteur du téléchargement ? Donc chaque Fonero devrait être considéré comme un FAI ? Ridicule !! Et ce n'est qu'un exemple.
Tellement ridicule que c'est étonnant que les représentants des FAI aient pu signer cela. Soit ils sont eux-mêmes totalement ignorants des réalités de l'internet et de ses progrès techniques et sociaux, soit ils ont reçu des pressions pour jouer le jeu.
Quelle perte de temps en plus, au lieu de réfléchir aux vraies solutions pour faire avancer ces industries en France, qu'elles innovent et ne se retrouvent pas à la traîne ! Car cet accord, c'est en fait une sorte de suicide collectif des industries de la musique et du film français. Car bien entendu cela n'arrêtera pas le progrès, et pendant qu'ils s'amuseront à essayer de protéger leur pré carré, les autres grands acteurs et les autres grands pays continueront d'avancer et c'est eux qui inventeront les nouvelles formes économiques de ventes de la musique et du cinéma sur terre.
J'ai fait un sondage ces derniers jours chez mes étudiants (une quarantaine au total). Qui téléchargeait des musiques pirates, qui achetaient des disques (ou des morceaux en ligne). En fait c'est extrêmement clair dans leur tête et dans leurs pratiques : les téléchargements "pirates" permettent de découvrir les morceaux et d'être sûrs que les disques ou les films sont bons, et très souvent ils achètent si ça en vaut la peine. Et grâce au téléchargement libre, ils ont découvert des tas d'artistes qu'ils ne connaissaient pas avant, et dont ils ont acheté les musiques quand ils avaient aimé. Ces jeunes reconnaissent donc parfaitement le droit à rémunération des auteurs, mais à condition qu'ils aiment. Ils ne veulent pas payer et se faire avoir ensuite. La technique le permet, pourquoi ne pas le faire ?
Je termine par cet extrait du discours de Sarkozy:
"Fini, les sept mois et demi d’attente entre le film qui sort en salle
et son apparition en vidéo à la demande. Avec cet accord, six mois
sépareront le film sur grand écran et son passage en vidéo sur petit
écran… C’est encore beaucoup, quand on sait qu’un film reste en moyenne
trois semaines sur un écran de cinéma, avant de laisser la place au
suivant ! Mais c’est déjà mieux. Et des discussions professionnelles
s’engageront sous l’égide du Centre national de la cinématographie dans
les meilleurs délais, pour adapter l’ensemble de la chronologie des
médias aux enjeux du numérique, comme le recommande le rapport de Denis
Olivennes."
On est fier de passer de 7 mois et demi à 6 mois entre la sortie du film au cinéma et sa mise en petit écran. A l'heure où tout est digital, où il n'y strictement aucune raison, ni économique, ni technologique, ni sociale, qu'un écart entre la sortie au cinéma d'un film et sa sortie sur DVD soit de 7 ou 6 mois, la France va s'attaquer au soi-disant problème des soi-disants "pirates", alors que c'est l'industrie de la musique et du cinéma qu'il faudrait astreindre à un changement radical de son économies préhistorique ? Et tout de suite, pas après des discussions avec les centre national de la cinématographie, etc... ?
Vraiment pour terminer, posez-vous la question de savoir pourquoi est-ce Apple qui a créé iTunes et l'iPod, alors qu'ils n'avaient jamais touché à la musique et qu'ils n'avaient aucun contenu, et pas l'une de ces grandes majors de disques spécialisées dans la musique et qui possédaient les contenus ? N'étaient-ce pas elles qui auraient dû innover en premier face aux révolutions technologiques et sociales en cours ?
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